Et si la réforme du Bac sciences et technologies annonçait la fin des écoles hôtelières ?

6 janvier 2015

J’avais il y a quelques semaines abordé la réforme du bac sciences et technologie de l’hôtellerie et de la restauration.

Voici ce que cette réforme changera au niveau de la formation selon le collectif anti reforme bac techno.

En premier lieu, parce qu’elle remet en cause un élément essentiel de la réussite des élèves : les travaux pratiques (T.P),relevant des domaines professionnels (cuisine, restaurant , hébergement) sont supprimés.

Or, nous savons tous, enseignants , élèves, étudiants, que ce qui pousse un élève de troisième à choisir la voie technologique- de préférence à la voie du Bac Professionnel, plus limitée en termes d’enseignement général et ayant pour objectif premier l’insertion professionnelle – c’est bien la complémentarité des deux enseignements , l’un théorique, l’autre pratique et concret.

Comment dans ces conditions leur apporter le savoir-faire nécessaire à l’interaction avec le client, tant au restaurant qu’en réception à l’hôtel ?

Comment apprendre à cuisiner , à servir un client, à le renseigner à la réception de l’hôtel qu’avec de la théorie ?

Pour ce qui est des stages, ils disparaissent de la formation : ce ne sont certainement pas les 15 jours de stage d’observation en entreprise en seconde , et les 10 jours filés, qui vont pallier cette carence. Le système actuel des stages de formation de huit semaines en seconde et huit semaines en première portant sur les trois valences (service, cuisine,réception) permet précisément une mise en situation où l’élève est acteur de sa formation et non observateur.

Il est fort à craindre que ces jeunes éprouvent alors un sentiment de frustration et perdent une grande partie de leur motivation.

Dans un article paru le 11 décembre 2014 dans le journal de l Hôtellerie Restauration n°3424 , Michel Lugnier , Inspecteur général de l’Education Nationale, cite , parmi les grandes lignes de la réforme, la refonte des programmes de la classe de seconde : ceux-ci se traduiraient par un renforcement de l’enseignement général et  »sont conçus pour permettre à un jeune de pouvoir revenir éventuellement sur son choix d’orientation à l’issue de la classe de seconde ». Dans cette optique, les enseignements techniques ne seraient donc que survolés et ne répondraient pas aux attentes des nouveaux entrants. De plus, l’expérience montre qu’ils ne sont qu’une infime minorité à revenir sur leur choix d’orientation et intégrer un lycée d’enseignement général.

Le second argument de Michel Lugnier est qu’ un très grand nombre de Bacheliers de l’enseignement général postulent à une Mise à Niveau ( MAN) pour rejoindre les BTS Hôtellerie Restauration : »nombre d’entre eux auraient pu effectuer le choix de la filière technologique au sortir du collège pour peu que les contenus mais aussi la finalité de cette série soient en phase avec les évolutions du lycée et permettent notamment une réversibilité des parcours ».

Est-il nécessaire de rappeler que la majorité des élèves de 3ème choisissent la voie de l’enseignement général car ils n’ont aucune idée de leur choix professionnel ,et se déterminent pour la plupart en classe terminale ou au mieux en 1ère ?

Si l’on en croit la logique de la réforme, les MAN seraient donc appelés à disparaître alors qu’ils ont d’excellents résultats au BTS.

Un rapport de l’Inspection Générale de 2004 soulignait pourtant la nécessité de maintenir la seconde spécifique telle qu’elle existe aujourd’hui : « la filière technologique hôtelière est spécifique par son histoire, sa culture ses objectifs et surtout sa vocation à former aux métiers de demain ».  « Supprimer la seconde spécifique en l’alignant sur l’esprit de la filière technologique industrielle , c’est tarir le recrutement essentiel mais aussi la logique de cette série ». Car c’est bien d’un alignement sur les autres séries technologiques qu’il s’agit. Et c’est bien de fiasco qu’il s’agit. Il n’est qu’à lire le rapport accablant de Sandrine Doucet , rapporteuse de la commission des affaires culturelles et de l’éducation de l’Assemblée nationale, paru dans le  »Café Pédagogique » le 03 Novembre 2014  » la réforme des bacs professionnels et technologiques critiquée dans un rapport de l’Assemblée »pour se convaincre de l’incohérence de la réforme.

Pourquoi alors vouloir casser un outil de formation qui a fait- et continue de faire- ses preuves ? Existe -t-il une autre formation qui puisse prétendre à un taux de réussite tel en termes d’insertion professionnelle ?

Dans son discours de clôture des Assises du Tourisme le 19 juin 2014, Laurent Fabius soulignait que le secteur du Tourisme  » génère deux millions d’emplois directs et indirects et pèse plus de 7% de notre PIB. La restauration et l’hôtellerie comptent à elles seules pour 75% de ces emplois, avec un excédent de balance des paiements de 12 milliards d’euros, c’est à dire un des plus élevés de nos excédents ». Et l’hommage qu’il rend aux établissements formateurs,  »…..des institutions d’excellence dont je salue l’initiative » n’est-il pas de nature à conforter notre conception de la formation ?

Le modèle existant répond aux exigences des professionnels dans un secteur porteur d’emploi où chacun trouve sa place et un salaire à l’issue de sa formation. Pourquoi vouloir détruire des formations qui génèrent des emplois en France comme à l’étranger?

Et que dire de la méthode employée par les instances supérieures qui engagent une consultation avec les enseignants et chefs de travaux alors que seuls, les nouveaux programmes de seconde sont soumis à notre réflexion? Comment les analyser de manière cohérente dès lors que l’ensemble du cursus de formation (trois ans) n’est pas pris en considération ?  »Aucune rénovation du BTNH ne peut être engagée sans avoir au préalable défini ses objectifs et les principes de son architecture spécifique ou non puis présenté des pistes de réflexion sur l’évolution des enseignements »: ces propos figurent dans le rapport de l’Inspection Générale remis en 2004, à l’époque où la réforme des séries technologiques- excepté l’hôtellerie- figuraient dans les projets du Ministre de l’Education Nationale.

Les enseignants ont été informés de cette réforme le 02 Décembre 2014, avec un complément le 11 Décembre 2014 par le journal de l’hôtellerie. Il est difficile de mener à bien une réflexion objective, aboutie et concertée dans un délai si court.

 

Page Facebook : Collectif anti reforme

Pour signer la pétition

Atabula

Ce qu’est l’école hôtelière selon Gil Galasso

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3 Comments

  • Reply Fages 6 janvier 2015 at 16 h 04 min

    Bonjour, au fait vous étiez ou lorsque les gouvernements successif cassés les LP ???? Jamais nous ne vous avons vu solidaire avec les LP. Vous savez là ou enseigne les profs de seconde zone, si vous aviez était là nous serions sans problème à vos côtés…… dommage !

  • Reply Galasso 8 janvier 2015 at 4 h 42 min

    Pour à part j étais solidaire et je me suis investit le plus que j ai pu

  • Reply LETIENNE 12 janvier 2015 at 16 h 52 min

    Pour ma part, à l’époque , mon mari professeur de PLP cuisine comme vous et moi Certifiée, dans l’établissement où nous étions, avons été solidaires aussi je comprends votre mécontentement. Pour autant sachez que les personnes qui suivent cette démarche aujourd’hui sont ceux -là mêmes qui vous ont soutenu lors de la réforme des Bac Pro. Cordialement.

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