Dans nos propos de table, nous avons choisi depuis quelques mois de vous proposer de découvrir l’univers feutré des tables de palaces parisiens, après le Crillon, le Meurice et le Bristol, nous avons décidé de rester dans le cœur du Paris chic pour aller côtoyer la scintillante place des joailliers : une question s’est alors posée Ritz ou Park Hyatt ?
Dans mes souvenirs enfantins de parties endiablées de Monopoly, la rue la plus chère de Paris était la rue de la Paix… La curiosité de découvrir la cuisine du discret Jean-François Rouquette mêlée à une envie de « bouffée de modernité » a donc guidé nos pas pour nous mener, et vous emmener, découvrir la cuisine d’un établissement de luxe made in USA.
Peut on vraiment parler de Palace lorsque l’on évoque le nom Hyatt, fusse t-il associé au mot « Vendôme » ?
Oui et non…oui car si l’on se réfère au niveau de prestations, elles sont dignes des plus belles maisons, la différence réside dans le fait que par « Palace » on entend pénétrer dans une maison chargée d’histoire, empreinte de traces de clients illustres, comme gravées dans les murs. Les palaces ont ce petit quelque chose qui sait les rendre si singuliers, ils transpirent le savoir faire maîtrisé, il y flotte quelque chose de délicieusement suranné et le temps s’est comme figé… ô temps suspend ton envol…
Par opposition et face à une demande croissante d’une clientèle internationale, on a vu émerger un nouveau concept : le « resort hotel », positionnement du mastodonte américain Hyatt. Par « resort » on entend des prestations de luxe mais on revendique fièrement un souffle nouveau : celui de la modernité dans un but unique, la quête du bien être immédiat de ses clients.
Plus branché que son petit frère de la Madeleine, on prête au Hyatt Vendome une clientèle de stars, jeunes, hype et sexy, mais également de leaders d’opinion ou d’indémodables. Nous déjeunerons ce mercredi à quelques mètres de monsieur Dombasle (en pleine sortie littéraire de son dernier opus à 4 mains) qui partage sa table avec un grand patron de presse.
Avec sa devanture discrète, on ne remarque pas réellement le Hyatt Vendôme, il faut dire que l’œil est sollicité en permanence par des vitrines plus belles les unes que les autres. Monsieur attendant Madame qui dévalise la boutique Cartier, pourra quant à lui découvrir l’existence de son entrée et envisager sinon un « breakfast at Tiffany » un « lunch at Hyatt Vendome »…
Premiers pas dans les couloirs du plus beau Resort parisien, premières impressions…deux surgissent immédiatement, ce côté ouaté avec des teintes chaudes pralinées, cette luminosité à l’approche du restaurant des Orchidées.
Petite précision, au Hyatt il y a deux restaurants, les Orchidées pour le déjeuner, frais et apaisant sous sa jolie verrière haute de plafond, et le Pure Grill pour les dîners gastronomiques, on passera sur le nom…
A peine calé dans les douillets coussins des banquettes des Orchidées, une sensation de bien être saisit immédiatement ; il y a de l’espace…des couleurs claires, on respire et on se détend, comme une envie de défaire sa cravate et de relâcher la pression.
La clientèle : affaires et pressée ! Il est 13h, nous sommes en semaine et dans les beaux quartiers, rien d’étonnant.
La carte : épurée elle aussi, dans le fond et dans la forme ; blanche immaculée dans son recto et graphique sur le verso et avec un contenu explicite, pas de segmentation sèche entrées-plats-desserts mais une suite de réjouissances « pour commencer…-ensuite…-les desserts… », on trouvera même une partie « encas » pour les déjeuners sur le pouce.
Une originalité…Aux Orchidées, il n’y pas de formule déjeuner affaires en semaine, comme dans beaucoup d’autres maisons, si l’on déjeune c’est à la carte, et les prix peuvent très vite s’envoler…noblesse des produits oblige ; pour un déjeuner « détente » prévoir donc de prendre le temps de lire la carte avec attention.
A la carte ce mercredi 15 octobre :
« Pour commencer… »
Salade niçoise, ventrèche de thon confit, huile d’olive du Moulin du Calanquet
Jambon Jabugo 5J de chez Sanchez Romero, grissini et salade de riquette
Foie gras de canard confit, figues et pruneaux, pain au levain grillé
Gougères à la moutarde et riquette, sabayon de pomme de terre, brocolis et truffe de Bourgogne
Cocotte de cèpes de châtaigner persillés
Saumon mi-fumé servi tiède, fenouil croquant, fruit de la passion et mangue
« Ensuite… »
Thon rouge de Méditerranée à la Grenobloise
Pavé de bar de ligne poêlé au beurre d’origan, cèpes et conditionnement bolognaise
Dos de cabillaud, mousseline de potiron butternut, châtaignes et truffes de Bourgogne
Carré d’agneau de « Pré-Salé » grillé au feu de bois, tarte fine de mozzarella et aubergine parfumée à la fleur de thym
Filet de veau rôti à l’arabica, girolles et pois gourmands, crème citron/amande
Suprême de volaille rôti au maïs, bouillon moussé à l’huile de noisette & girolles
Pièce de bœuf Wagyu grillé aux sarments de vigne, mille-feuille d’agria & poivrons confits, sauce aigre douce
« Les garnitures »
Pomme purée Belle de Fontenay au beurre bordier
Poêlée de légumes primeurs
« Les desserts »
Fromages affinés de chez Marie Quatrehomme
Desserts du chariot
Assiette de sorbets
Assiette de fruits frais
A cette jolie carte bien fournie s’ajoute quelques entrées ou plats du jour pour élargir encore plus son choix.
Champagne Brut Réserve Billecart Salmon et Brut Rosé Laurent Perrier servis à juste température, comprendre, non frappé comme dans beaucoup d’établissements où l’on dénature le produit. En amuse bouche, une crème de haricot rouge fondante telle une mousse à tartiner sur des tortillas moelleuses.
Le temps de faire notre choix, ce qui n’est pas une mince affaire, et de négocier le « qui prend quoi ?» Nous parvenons, avec l’aide du maître d’hôtel et ses excellents conseils, à un protocole d’accord (nous aussi nous faisons du business !) :
Gougères et dos de Cabillaud pour Madame, Saumon mi-fumé et filet de veau rôti à l’arabica pour Monsieur !
Un peu de vin ? Oui s’il vous plaît…
Condrieu La Galopine de chez Delas Frères et Chablis de chez William Fèvre qui arrivent légèrement en différé avec les entrées, dommage…
Silence de contemplation face à toutes ces couleurs et ces assiettes gourmandes et généreuses, on en profite pour souligner la vaisselle, particulièrement bien choisie. Rentrons désormais dans le vif de sujet et avec quel plaisir…
Légères, aériennes, crémeuses, les gougères fondent en bouche et le sabayon de pomme de terre est d’une délicatesse extraordinaire, il caresse avec soin le brocoli croquant, la truffe de bourgogne laisse un léger parfum évanescent, c’est fin et c’est fluide comme si l’on était sur un nuage…
Belle onctuosité également sur ce saumon parfaitement fumé ou mi-fumé, devrait-on dire…légère perception du fumé qui souligne juste la fraicheur et le joli goût presque « nature » du saumon, pas de soif immédiate, l’assaisonnement est juste, ce qui est périlleux sur les poissons fumés. Fenouil présent mais toujours là où il faut, en toute discrétion, arôme de fruits exotiques qui amènent de la douceur et un sourire…
Poursuite sur la « main course », là encore de très belles assiettes, une générosité des produits qui rappelle la cuisine bourgeoise de famille, le poulet fermier et son jus, la purée maison, la poêlée de champignons, la tarte aux pommes, les madeleines de Proust…pendant une fraction de secondes on repart avec joie dans son enfance revisiter les classiques qui rendent heureux parce qu’ils sont simples mais surs.
Toutes ces girolles ! que demande le peuple ! un veau fondant, goûtu et finement relevé, qui laisse entrevoir un goût de noisettes, en accord parfait avec la crème d’amande et citron, du croquant et de la couleur avec les pois gourmands.
Le Cabillaud, mérite un C majuscule ! Nacré, belle cuisson où la chair est ferme et se détache sans s’émietter, gourmand, généreux, jolie valse colorée, on salive à l’instant même où l’assiette est posée…Du potimarron, des châtaignes… L’automne au coin du feu, un dimanche en campagne brumeuse….La saisonnalité ! Il n’y a que cela d’authentique et de louable : qui, après tout, pourrait envisager de faire du ski en plein été ? Pourquoi cette quête contre nature ? La vraie subversion est dans la volonté de coller au moment présent.
Les vins…je reste sur mon chablis, Stéphane est désormais passé sur un pinot de chez Bouchard, Côte de Beaunes 2006, pas de mauvaise surprise comme vous pouvez vous en douter…
Les desserts, en charriot !!! Waouhhh, cela se perd et là encore cela fait appel aux souvenirs et à l’illumination dans les yeux enfantins à la vue de toutes ces tentations ; Il y a toujours cette même attente dans les desserts des grandes tables, l’émerveillement des yeux comme si l’on attendait le bouquet final du feu d’artifice. Il faut terminer avec panache et visuellement les chefs pâtissiers regorgent d’imagination pour nous proposer de véritables œuvres d’art, merveilles d’architecture pouvant parfois déjouer les lois de la gravité.
Aujourd’hui on nous propose 5 desserts, deux chocolatés, une tarte aux fraises et à la pistache, un macaron noix de coco et tenez vous bien, un dessert allégé pour les clients désireux de garder la ligne, et oui ce dessert n’a pas la côte qu’auprès des femmes !
Nous n’aurons qu’un mot et Dieu qu’il est magique : chocolat !
Dans la version « tout noir » il s’agit d’un sablé breton tout chocolat, crémeux « araguani », noisettes caramélisées une petite merveille en bouche, le grand cru vénézuélien est superbement mis en valeur car le dessert malgré sa forte concentration aromatique reste assez léger, on ne se sent pas plombé, on termine sur une belle longueur cacaotée en bouche. Petit verre de Maury pour équilibrer le tout.
Dans la version « au lait » nous sommes face à un dessert extrêmement graphique ou tout est dit dans le titre : barre au caramel demi sel, chocolat au lait et crème brûlée vanille, il y a un côté « twix » dans cette barre avec ce biscuit croquant, la crème est onctueuse, le caramel tient ses promesses. On observera toutefois un ensemble un peu sucré qui nous fera penser que ce dessert prendra plus de dimension à l’heure du goûter avec un café au lait ou un thé ; triste sort que celui du dessert de venir conclure un repas déjà fort en émotions…
Que dire du service, sympathique, disponible, moins « palace », au sens de moins de chichi, les choses ayant cependant bien évolué en la matière. De bons conseils sur la carte ou même sur le choix de notre café, un petit bémol sur la partie vin où l’on aurait aimé être un peu plus guidé.
La salle….spacieuse, aérée, avec ses bacs d’orchidées blanches et des miroirs jouant avec la lumière de la verrière ; jolis services de tables sans fioriture, on va droit à l’essentiel. On se sent bien…et si l’on appuyait sur pause…
Quant à la cuisine, elle respire le bien-être, elle est intelligente car elle est simple, franche et qu’elle est gaie ! C’est amusant « Rouquette » comme nom, cela doit sans doute être pour cela que la cuisine de ce Monsieur ne se prend pas au sérieux et qu’elle sait, le temps d’un repas et plus, rendre heureux…
Texte: Laurène, Photos Stéphane
5 rue de la Paix, Paris, 75002, France
Tél. : +33 1 5871 1234
E-mail : paris.vendome@hyatt.com
7 Comments
superbes photos pour un endroit magique . je me souviens d’un bon moment passé là bas autour d’un thé glacé au concombre et jasmin … d’avoir admirer les pâtisseries au design sans pareil, et profiter du calme de l’endroit .
j’y suis allé deux-trois fois le samedi à midi, et une fois au Pur Grill, c’est effectivement une belle cuisine, le cadre des Orchidées est très agréable, par contre, le Pur Grill est un peu sombre.
J’avais trouvé les prix too much, malgré tout, on paie clairement une prime pour l’adresse et le côté luxe *****
Très belles photos et compte rendu; combien faut-il compter en moyenne pour un menu entrée+plat+dessert ?
Les saveurs sont certainement bien présentes mais j’ai l’impression que c’est quand même une cuisine assez classique. On avait déjeuné au Ritz il y a quelques années, et je n’en ai pas gardé un souvenir impérissable non plus… bon mais classique, sans émotion, et un service qui n’était pas à la hauteur de ce genre d’établissement (c’était peut-être un mauvais jour ;-))
En tous cas je vois que l’heureux Papa trouve toujours le temps de satisfaire sa curiosité gastronomique 😉
que belles de photos! Bravo Stephane.. 🙂
J’aime Paris beaucup!
Mercì pour cette post gourmand
salut et bravo c’est superbe !!! cet établissement est magnifique le cadre et la cuisine laisse reveur !!!!:)c’est une excellente adresse qui change des palaces plutot classique celui ci est créatif et contemporain !! une étape a ne manquer sous aucun prétexte !! bravo stéphane des photos sont plus vraies que nature !! la gourmandise sans modération !!
que beau billet! J’ai eu la chance d’y prendre le thé, j’aurais bien gouter à tout le reste 😉 Ciao
Bonjour,
Ma Dame m’a parlé de vous, elle vous aime bien et elle a raison. Je viens de passer 1/4 d’heure magique à rêver de ce restaurant où je n’irai pas (pas assez cachère je le crains…), mais où le plaisir que vous y avez pris est tellement bien rendu qu’on s’y croirait…
Bonne continuation, et à bientôt sans doute.